Mission MDCC – ASF France Auvergne janvier 2022

Jour 1 : 17 janvier

A peine le temps de nous installer, Fabiola nous envoie les 1ers patients…

Débuts un peu flottants, nous n’avons pas encore pris les lieux en main, installé notre matériel. Nous disposons de 2 salles, l’une pour les femmes et l’autre pour les hommes, ayant chacune 2 lits.
Aujourd’hui 9 patients, Syriens afghans palestiniens…De lourdes pathologies traumatiques, sur des terrains de fortes insuffisances de Qi et de sang. Le travail qui nous attend est impressionnant, intense…
Les patients ont la possibilité de revenir tous les jours, donc, nous avons l’espoir de pouvoir avancer le travail.

L’accueil de Fabiola et de l’équipe est très chaleureux, Maria une autre volontaire jeune physiothérapiste, est là depuis 1 mois, elle va rester encore un mois.

A demain pour la suite

Jour 2 : 18 janvier

Ce matin nous sommes prêtes, plus fraîches qu’hier, et surtout remplies d’une motivation grandissante : que va nous réserver cette nouvelle journée ?

Nous prenons le petit déjeuner au dispensaire avec toute l’équipe, l’ambiance et chaleureuse, et donne cette impression que nous avons toujours été là avec eux… Pour avoir balayé le planning des rendez-vous avec Fabiola hier soir, nous savons que notre 1ère patiente, jeune fille de 19 ans nous mettra à l’épreuve. C’est peu dire…

Les vécus sont tous plus durs les uns que les autres, mais, comment dire, ceux que nous lisons chez les jeunes femmes et jeunes hommes, si pudiques, nous troublent par les marques profondes laissées sur leur âme. La parole est rare, les visages lisses, mais les tourments vibrent sous la carapace de pudeur. Nous savons que tous attendent…attendent quoi ? Qui ? comment ? C’est bien cela qui pose problème. Car au gré des refus de transfert ou d’officialisation de leur situation administrative, des symptômes s’aggravent, toujours sans un mot de plus…sans une plainte…

Nous aurons 13 consultations aujourd’hui…

Nos marques sont prises, nous bénéficions d’un espace pratique et confortable. Mais pas une minute de répit, car tout le monde doit réintégrer le camp suffisamment tôt. Earth Medicine prépare les repas du midi pour tous les patients, la nourriture du camp étant inadaptée, l’ONG offre ce moment de partage et de chaleur autour d’un repas auquel nous participons avec joie, vers 14H. Les fiches d’activité sont rédigées dans la foulée, et nous proposons que les consultations ne soient pas quotidiennes afin de permettre à de nouveaux patients d’être traités. Il est d’ailleurs prévu que nous allions dans le camp afin de repérer des personnes susceptibles d’avoir besoin de traitement.

Le temps est clément pour l’instant, demain il va se rafraichir, mais nous ne profitons pas de l’environnement : à vrai dire, je ne réalise pas que je suis en Grèce…Mais dans un lieu si intemporel…

A demain

Jour 3 : 19 janvier

Hier était le 3ème jour…le jour de la fatigue en général. Je n’y ai pas échappé. Nous avons reçu certains patients pour leur 3ème consultation, et quelques nouveaux arrivants.

Les résultats sont encourageants, mais je pense qu’il faut éviter de traiter quotidiennement certains patients trop fatigués. Je propose que soient espacés les traitements pour quelques-uns d’entre eux.

Nous observons les différences de pathologies entre hommes et femmes : impactés par les circonstances dramatiques de leur départ, puis leur vie dans les camps, les hommes pour la plupart vont perdre du poids, présenter des dysfonctionnements majeurs au niveau intestinal et digestif, les femmes, elles vont prendre du poids, développer des œdèmes impressionnants et déformant dans le bas du corps, des insomnies…

Le soir nous sommes allés dans un restaurant ouvert par une dans le but de donner un travail aux réfugiés et aidés par des volontaires : délicieux repas et ambiance chaleureuse.

Mytilène est une ville sans beaucoup de charme, mais il est bon de marcher après une journée de soin….

Compte-rendu de la mission

Notre mission arrive à sa fin… Claudine et Anna vont prendre le relais à partir du 20 février.

La rédaction des fiches patients nous a pris beaucoup de temps mais est nécessaire à la transmission des informations tant de soins donnés que de remarques sur les changements constatés pour chaque patient.

Nous avons réalisé environ 150 consultations, et traité environ 25 patients qui ont ainsi pu bénéficier de soins réguliers. Pour certains, tous les jours, pour d’autres tous les 2 ou 3 jours. Des changements commencent à être visibles sur les plans des douleurs articulaires, mais aussi sur le plan psychique, des regards et des sourires nous laissent à penser que nous avons pu donner un peu de bien-être. Des estomacs ont accepté de mieux manger sans se rebeller, des têtes douloureuses ont autorisé un sommeil plus réparateur. Cependant, il reste des maux récalcitrants, pour lesquels il a été plus difficile de voir s’ils avaient été ne serait-ce qu’un peu dérangés par nos soins…Ces maux qui viennent de loin, de profond, qui génèrent des nuits d’insomnies et de cauchemars… Ceux-là vont bien un jour, et nous pensons alors avoir trouvé le bon chemin, puis le jour suivant tout revient…enfin…pas tout à fait semble-t-il, car des mots traduisent parfois une légère nuance dans la réponse à nos questionnements.

Nous allons repartir, mais revenir, tant ici c’est maintenant avec ces immenses espoirs d’un mieux vivre, que nous accompagnons à notre façon, par nos gestes et nos cœurs. Nous sommes aussi une partie de cette humanité, sa souffrance nous concerne, nous impacte.

Alors, avec ce que chacun d’entre nous sait faire, nous pouvons nourrir la vie qui donne cette énergie si remarquable qu’elle nous fait franchir des montagnes de désespoir.

Lyna